Pourquoi la téléphonie échappe-t-elle à la mode du Cloud ?
Cloud par-ci, Cloud par là… Personne ne semble pouvoir échapper à cette mode. Et pourtant, si le Cloud est une évidence dans certains domaines, il n’est pas la panacée pour d’autres. Déjà 35% des TPE et PME françaises utilisent le Cloud pour l’hébergement de leur site, la sauvegarde de données et certains logiciels. Pourtant, la téléphonie d’entreprise semble faire figure d’exception ! Arrivée dans les années 2005, la téléphonie hébergée pour entreprise n’a jamais décollé. Par Maxime Denis, expert des télécommunications, Alliance Telecom.
Qu’est ce qui explique les écueils successifs rencontrés par les entreprises qui s’y sont essayées ? On peut notamment citer les faillites et rachats successifs d’acteurs de la téléphonie Cloud en difficultés entre 2008 et 2015 tels que le rachat de B3G, la faillite de ICTelecom en 2012, les trois plans sociaux de NetCentrex en 2010. Malgré le lobbying et le tapage marketing des opérateurs télécoms depuis des années, 7% des entreprises françaises étaient passées à la téléphonie hébergée en 2011 (Scholè Marketing).
Le monde des télécoms redescend de son petit nuage. Regardons d’un peu plus près les freins aux services et produits Cloud. Pourquoi la téléphonie classique, physique et matérielle est-elle si difficile à déloger ? Au même titre que l’informatique, la téléphonie d’entreprise nécessite un serveur en local branché sur le réseau informatique (IP) qui gère simultanément les fonctionnalités téléphoniques, les utilisateurs, les lignes et les communications téléphoniques. Car n’oublions pas qu’il faut gérer la Voix en temps réel… On ne peut pas se permettre de perte de qualité !
Historiquement, ce serveur installé dans les entreprises se nomme IPBX. Depuis quelques années, l’IPBX peut aussi être virtuel et hébergé sur un serveur informatique de l’entreprise.
L’offre de téléphonie Cloud, IP Centrex, se caractérise quant à elle, par l’absence de serveur dans l’entreprise. Toutes les communications passent obligatoirement par la connexion Internet de l’entreprise et par les data centers Cloud du fournisseur. L’entreprise n’a que des téléphones sur les bureaux et paie un loyer mensuel par téléphone. Les numéros et communications téléphoniques sont indissociables de l’offre. Si le prestataire Cloud plie boutique, tout est perdu…
Et c’est bien le problème. Le Cloud ne respecte pas notre besoin primaire d’indépendance. On dépend du loueur. Il est aujourd’hui encore compliqué de s’en détacher ou se désengager. On maîtrise moins la situation et on risque un coupure de téléphone ou de perdre ses numéros. De plus, les Français sont d’un naturel méfiant. Ils ont peur de décentraliser dans un nuage où leurs données sont stockées, utilisées (revendues ?) et parfois piratées. Ils aiment garder le contrôle et faire les choses eux-mêmes. Les scandales à répétitions sur la sécurité des systèmes d’informations ne sont pas là pour les rassurer.
Plus que jamais les entreprises traquent les économies. Elles visent le prix et la rentabilité de leurs choix. La téléphonie Cloud elle, finit par être un luxe qui se paie chaque mois.
En fait, ce qui fait la croissance du marché du Cloud aujourd’hui, ce sont ses avantages client qui dépassent de loin tous les inconvénients ou les peurs. La stagnation de la téléphonie Cloud provient du fait que les inconvénients demeurent trop lourds. Les offres non hébergées sont aujourd’hui largement plus novatrices, flexibles, ouvertes, offrent une meilleure qualité de communication et sont plus économiques à moyen terme. Surtout qu’il est maintenant possible de sécuriser l’installation téléphonique avec une solution de redondance dans le Cloud en cas d’avarie ! Les services informatiques apprécieront de ne pas avoir tous leurs œufs dans le même panier !
Malheureusement pour elles, les offres Cloud coûtent généralement 33% plus cher que les solutions de téléphonie vendues par licences ! En sachant que les solutions de téléphonie sans licence et garantie à vie existe, il ne reste à la téléphonie Cloud que le marketing. Bref, la téléphonie Cloud n’est pas prête à monter au 7ème ciel.