Le système 5-c deviendra t-il la nouvelle norme des informations nutritionnelles on-pack ?
Le HCSP a récemment donné un avis favorable au nouveau code de cinq couleurs. Si pour l’instant ce système n’est pas encore obligatoire, on peut d’ores et déjà s’interroger sur la faisabilité de la mise en place d’un tel système, sur ses implications pour les industriels et les agences de design packaging, et enfin sur son adéquation avec les attentes des consommateurs. Par Ana Manuel-Buchard, planneur stratégique, agence Logic Design.
Aujourd’hui, trois types d’informations nutritionnelles obligatoires cohabitent
Parmi les informations obligatoires qui figurent sur les emballages de produits alimentaires : tout d’abord les GDA (Guideline Daily Amounts) ou RNJ (Repères Nutritionnels Journaliers) qui indiquent le nombre de calories par portion ainsi que le pourcentage des besoins journaliers d’un adulte. Ils doivent être placés sur la face avant des emballages de la majorité des produits alimentaires afin d’être visibles au premier coup d’œil. Ensuite figurent les tableaux de valeurs nutritionnelles et les listes d’ingrédients, qui offrent des informations plus détaillées, et qui sont placés au dos ou sur les côtés des emballages.
Le HCSP favorable à un nouveau système pour simplifier la compréhension
Le 24 août dernier, le Haut Conseil de la Santé Publique (HCSP) a donné un avis favorable à la mise en place d’un nouveau système facultatif. Apposé sur la face avant des emballages, ce système devrait devenir, à terme, la seule information légale nutritionnelle à y figurer. Le « système 5-C » a pour but de permettre aux consommateurs de classer les aliments selon leurs qualités nutritionnelles suivant une échelle à 5 niveaux (couleurs et lettres). Un principe simple qui s’est inspiré des étiquettes-énergie de l’électroménager, et des Diagnostics de Performance Énergétique du secteur Immobilier. Mais si la forme du système 5-C n’est pas encore définitive, ce dispositif fait d’ores et déjà couler beaucoup d’encre.
Les industriels réticents à démultiplier les systèmes d’informations
Les industriels paraissent réticents à mettre en place ce système 5-C, qui reste pour l’instant facultatif. En effet, nombre d’entre eux sont déjà engagés dans leur propre démarche de simplification des informations nutritionnelles et ne souhaitent pas faire cohabiter plusieurs systèmes. Les consommateurs français ont déjà pu tester plusieurs initiatives de simplification des données nutritionnelles. Ainsi, le système McDonald’s, basé sur les besoins nutritionnels journaliers moyens d’un adulte, est présenté sous forme de jauge ; tandis que celui de Carrefour (mis en place en décembre 2014) met en avant la fréquence à laquelle le produit peut être consommé
Des limites à l’intégration du système 5-C sur les emballages
D’un point de vue design, le système 5-C, dans son état actuel, présente plusieurs limites à son intégration. La première est celle de l’espace disponible sur les emballages. En tant qu’agence de design, nous avons parfois affaire à des produits aux facings minuscules, il n’est pas toujours aisé d’intégrer un tel système sur le packaging, en complément des autres informations légales et de celles que la marque souhaite communiquer. Le système 5-C doit donc trouver une expression graphique pertinente, et assurer une cohérence des informations nutritionnelles sur l’ensemble du packaging pour ne pas créer plus de confusion. La seconde limite concerne le manque de souplesse graphique. À la fois uniforme et multicolore (contrairement au GDA dont on peut choisir la couleur), il assure une bonne lisibilité, mais celle-ci s’opère au détriment de l’esthétisme et des territoires graphiques des marques. Enfin, la troisième, concerne les techniques d’impression, puisque certains matériaux ne permettent pas d’imprimer toutes les couleurs que comporte le système 5-C actuel.
Les avis des consommateurs divergent
Chez les consommateurs les avis sont également partagés. D’un côté, certains jugent le système 5-C intuitif et universel, y compris les personnes percevant mal les couleurs, et ce, grâce à sa notation de A à E. D’un autre côté, certains consommateurs soulèvent le problème de la subjectivité du système sachant que chaque personne a des préoccupations nutritionnelles très différentes. Pour ceux-là, le système idéal serait sans doute un système de notation coloriel associé à des informations rationnelles, comme c’est le cas pour les « Traffic Lights » anglais. Enfin, il faudra aussi prendre en compte les consommateurs des Drive, qui regardent peu les informations présentes sur les emballages. Pour eux, une des solutions serait que les distributeurs fassent apparaître le système 5-C sur leur site de courses en ligne, à la manière des logos promo par exemple. En réalité, le seul point de convergence parmi les consommateurs est le suivant : si le système 5-C est mis en place la grande majorité d’entre eux pense tenir compte de ces informations lors de leurs achats… Quitte à vérifier le tableau de valeurs nutritionnelles pour voir si le produit leur convient réellement !
Dans une société française où l’alimentation industrielle est perpétuellement suspectée des plus grands maux, et où les trois quarts de ses habitants déclarent faire attention à avoir une alimentation équilibrée, des solutions pour éclaircir les mystères nutritionnels sont mises en place, et ne cessent d’être améliorées. Néanmoins, le système 5-C, tel que conçu aujourd’hui, peut apparaître davantage comme un jugement de valeur que comme un système d’informations concrètes et objectives (fréquence de consommation conseillée et apports journaliers) qui permettent de comprendre la qualité nutritionnelle des produits achetés.