La RSE, une notion aux contours flous pour les salariés
A quelques heures du vote par les sénateurs de la Loi Pacte, qui vient renforcer les obligations des entreprises en matière de Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE), Ipsos et Openmind Kfé dévoilent les résultats d’une étude sur la perception de la RSE par les salariés et ses enjeux pour demain. Parmi les grands enseignements de l’étude, on retient notamment que si le principe d’engagement des entreprises à investir dans leur RSE apparaît clairement plébiscité, son application concrète reste encore incomprise, et qu’une grande partie des salariés remettent en cause la sincérité de cette démarche et n’y voient pour eux aucun bénéfice direct et individuel.
Selon l’étude*, la RSE reste une notion assez floue tant sur les perceptions que sur les enjeux qu’elle recouvre. 51% des salariés interrogés déclarent en effet avoir une idée de ce qu’est la RSE alors qu’une minorité seulement (12% d’entre eux) affirme savoir précisément de quoi il s’agit. Lorsque les salariés sont questionnés cette fois sur le sens de la RSE, celle-ci reste perçue à l’aune de thématiques sociales, comme la mobilisation des parties prenantes pour 33% des salariés (qui évoquent alors l’entreprise, le salarié et le personnel), ou sociétales. Elle est alors vue comme une forme d’engagement.
Elle recouvre en effet pour 1 salarié sur 4 des notions de responsabilité, d’éthique et de respect. Il ressort des résultats de cette étude que la RSE est encore très peu associée à des thématiques et enjeux liés aux ressources humaines, ici en dernière position.
Alors que la RSE est par essence une partie intégrante de la gestion du capital humain, son sens est mal saisi et 1 salarié sur 2 ignore encore de quoi il s’agit (49%).
L’image de l’entreprise, principal moteur d’engagement RSE
Même si 3 salariés sur 4 (77%) pensent que leur entreprise agit pour apporter du sens et des solutions aux enjeux sociétaux, le côté « vitrine » prend le pas sur la démarche vertueuse et sincère. L’engagement de l’entreprise serait d’abord motivé, selon eux, par une volonté d’améliorer son image (55%), avant de progresser sur la dimension éthique de ses activités (46%), et de répondre à ses obligations légales (39%). Pour les salariés, des considérations externes et de notoriété sont donc prioritaires pour la mise en place d’une stratégie et d’une démarche RSE. Cette dernière aurait une finalité plus utilitariste qu’engageante. A noter également que 33% des salariés interrogés estiment qu’il s’agit d’une politique destinée à renforcer la fidélité des clients : une opération séduction donc, visant en premier lieu à améliorer le business de l’entreprise.
Un enjeu d’appropriation de la RSE à l’interne
Pour s’affirmer et engager l’interne, la RSE doit encore trouver ses adeptes… Et bénéficier à tous. Les salariés jugent en effet que les actions RSE de leur entreprise impacte positivement sa notoriété et son image (45%), la qualité des relations avec ses clients (41%) et son attractivité (40%). A l’inverse, la politique RSE des entreprises n’est pas pour ces salariés un facteur de motivation au quotidien ni de projection à moyen terme dans leur organisation (avec des impacts respectifs de 38 et 39%)
Pour s’imposer à sa juste valeur, la RSE va ainsi devoir répondre à des enjeux affirmés : réussir à embarquer les collaborateurs, et s’imposer comme un sujet clé. Et le chemin est encore long : 57% des salariés interrogés se disent ainsi mal informés sur la politique de RSE de leur entreprise, alors qu’une minorité (39%) se satisfait de sa connaissance du sujet.
Julia Pironon, Directrice de Clientèle au sein d'Ipsos ERM l’analyse ainsi : « Les salariés ne se reconnaissent pas dans les engagements RSE de leur entreprise car ils n’ont pas conscience de ce que recouvre cette notion. Ils s’estiment mal informés des actions concrètes mises en place au sein-même dans leur entreprise. Cela dénote certainement d’un manque de communication en interne sur ces sujets. » Ce manque d’information, déploré par les salariés, suscite également le sentiment d’un retard à prendre le sujet de la RSE en main : ainsi, plus d’1 salarié sur 4 (27%) estime que son entreprise a du retard sur son positionnement RSE.
Un pilote pour la politique RSE de l’entreprise : les ressources humaines
Afin d’inclure davantage les collaborateurs dans leur démarche RSE, les entreprises doivent donc développer plus de pédagogie, sensibiliser et mobiliser toutes les parties prenantes en interne, avec un objectif : faire des salariés de réels ambassadeurs pour les engager comme les principaux acteurs de leur politique RSE.
Les attentes et les perceptions des salariés sont ainsi autant de clés qui permettent d’affiner le positionnement de l’entreprise. Les écouter permettra, in fine, de rester en phase avec l’ADN et les préoccupations de l’entreprise et de se différencier de la concurrence. « A l’heure où les entreprises rivalisent d’actions et revendiquent le bien-être en entreprise, il est grand temps de considérer les véritables motivations des salariés : la quête de sens et l’engagement sont à inscrire au cœur des démarches RH et RSE de l’entreprise. Pour autant la RSE n’est pas toujours dans l’ADN de l’entreprise. Il faut porter des actions concrètes qui ont un impact social et solidaire. Nous devons, chacun individuellement, être co-acteur et inspirer les valeurs de ce changement pour que la RSE existe davantage. L’écoute des collaborateurs en entreprise dans une démarche participative, où l’intelligence collective peut s’exprimer est un excellent vecteur d’engagement dans la RSE. » affirme Xavier Ginoux, Président fondateur d’Openmind Kfé.
*Étude Ipsos pour Openmind Kfé menée du 24 septembre au 12 octobre 2018 en ligne auprès de 870 personnes, constituant un échantillon représentatif de la population française.